mercredi 24 décembre 2014

Gaza, Turquie, Qatar : les trois pôles internationaux du Hamas


Par Yaakov Lappin
Special to IPT News
18 décembre 2014

Traduction française : Johan Bourlard

Ces dernières années, l’organisation terroriste palestinienne Hamas s’est muée en véritable organisme international disposant à l’heure actuelle de trois bases territoriales opérationnelles, à savoir Gaza où siège le Hamas, la Turquie et le Qatar.

Selon les services de renseignement israéliens, chaque base poursuit ses propres objectifs. Au gré des activités terroristes diverses qu’elles mènent, les trois bases ont opéré tour à tour en harmonie et en désaccord, de concert et séparément.

Selon une source proche des services de sécurité, les structures de commandement du Hamas de chaque base « ne constituent pas un même leadership ».

« Le Qatar abrite la branche politique du Hamas, dirigée par Khaled Meshaal. En Turquie [dans la ville d’Istanbul] siège la branche militaire du Hamas qui y met sur pied une infrastructure terroriste. Cette branche se compose en partie d’anciens prisonniers du Hamas expulsés d’Israël lors de l’échange de prisonniers effectué [en 2011] pour récupérer Gilad Shalit. Gaza abrite quant à elle les deux types d’agents, politiques et militaires. »

Les trois branches, dont chacune joue un rôle particulier, connaissent des relations fluctuantes.

Le siège du Hamas à Istanbul est dirigé par Salah Al-Arouri, une figure de proue de l’aile militaire qui se consacre au rajeunissement des cellules terroristes du Hamas en Cisjordanie avant de les utiliser comme tremplin pour la préparation d’attentats meurtriers contre Israël.

Gaza abrite la principale aile militaire du Hamas, les Brigades Ezzedine al-Qassam, dont les agents se consacrent au développement de leur puissance de frappe constituée de roquettes et des réseaux de tunnels. À l’instar d’Al-Arouri, ils cherchent également à créer des cellules terroristes en Cisjordanie.

Jeudi, le Hamas a organisé ce qu’il appelle son plus important exercice militaire depuis la guerre contre Israël de l’été dernier.

Gaza abrite également l’aile politique du Hamas, dirigée par Ismaïl Haniyeh.

Selon la source déjà citée, « ils ont tous leurs intérêts propres. Ceux de Gaza ont leur point de vue et ceux de l’étranger en ont un autre. Par le passé, il y a eu des désaccords. »

À titre d’exemple, citons le différend qui a opposé, l’été dernier, Khaled Meshaal au Hamas de Gaza concernant le moment où se terminerait la guerre contre Israël. Meshaal incitait le Hamas à poursuivre le combat malgré les appels de plus en plus nombreux lancés par le Hamas de Gaza en faveur d’un cessez-le-feu. Les antagonismes résultaient en partie du critère géographique : alors que le Hamas à Gaza pouvait évaluer en temps réel l’ampleur des dommages que lui infligeait Israël durant les combats, Meshaal, confortablement installé dans une banlieue chic du Qatar, pouvait se payer le luxe d’appeler à la poursuite de la lutte.

Malgré ces divergences, il existe une base commune de coopération et d’accord entre les trois branches. Ainsi Saleh Al-Arouri, basé en Turquie, ne se serait jamais lancé dans des missions aussi importantes que la mise sur pied d’un réseau terroriste du Hamas à grande échelle en Cisjordanie, la planification d’atrocités contre Israël ou encore la tentative de renversement de l’Autorité palestinienne et de son président, Mahmoud Abbas, sans le consentement de Khaled Meshaal et du Hamas de Gaza.

La coopération n’est certes pas toujours étroite mais elle existe.

« Il y a des connexions » selon la source proche des services de sécurité. « Le Hamas à Gaza est relié à ceux qui essaient d’organiser le terrorisme en Judée et en Samarie. Il existe un cercle de coopération. »

Al-Arouri peut rechercher l’aide de Gaza et l’obtenir, comme il l’a déjà fait, mais il peut également travailler de façon indépendante. « Il n’y a pas de règle », souligne la source en question.

Ces derniers mois, le Shin Bet [l’Agence de sécurité israélienne] a déjoué deux complots d’attentats terroristes tramés par le Hamas en vue d’infliger à Israël un maximum de pertes et dans le but d’affaiblir le Fatah en Cisjordanie. Les deux complots étaient liés à Al-Arouri.

Cette découverte a conduit les chefs de la défense israélienne à hausser le ton par rapport à la base du Hamas située en Turquie.

Au début de ce mois, le ministre israélien de la Défense, Moshe Ya’alon, a déclaré à son homologue espagnol : « Les quartiers généraux terroristes du Hamas sont à Gaza et à Istanbul. C’est incroyable qu’un pays membre de l’OTAN héberge sur son territoire le siège d’une organisation terroriste ».

« Nous avons empêché un coup d’État projeté par le Hamas et préparé, entre autres, au sein des quartiers généraux turcs, contre [le président de l’Autorité palestinienne Mahmoud Abbas] Abou Mazen en Judée et en Samarie. Nous l’avons sauvé de cette révolution. Il est donc très important, pour notre liberté, d’agir sur le plan de la sécurité en Judée et en Samarie », a déclaré Ya’alon.

De la même manière, fin novembre, le Shin Bet et l’armée israélienne ont annoncé qu’ils avaient démantelé une infrastructure terroriste du Hamas d’envergure internationale en pleine préparation de multiples attentats très meurtriers, notamment un attentat à la bombe visant un stade de football à Jérusalem.

Le complot prévoyait des attentats à la voiture piégée, des attentats à la bombe sur le réseau de trams à Jérusalem et des attaques ciblant des Israéliens à l’étranger.

Cette affaire illustre la position de plus en plus centrale occupée par Istanbul dans les activités terroristes du Hamas en Cisjordanie. Le siège du Hamas en Turquie est devenu un centre de commandement et de planification de premier plan.

Au début de cette année, le Shin Bet a annoncé le démantèlement d’un autre vaste réseau du Hamas en Cisjordanie mis sur pied par Saleh Al-Arouri à Istanbul et dirigé à Ramallah par un membre local du Hamas.

Selon une enquête israélienne, le Hamas a écoulé plus d’un million de shekels [plus de 250.000 dollars] au profit d’agents terroristes pour la préparation d’une série d’attentats destinés à détourner l’attention de Gaza et finalement conduire à la chute de l’Autorité palestinienne dirigée par le Fatah. Ce projet aurait dû se réaliser en incitant Israël à mener une riposte sévère en Cisjordanie, en déstabilisant la région et en conduisant au renversement de l’Autorité palestinienne.

Le Hamas a parcouru un long chemin depuis l’époque où ses fondateurs, des agents des Frères Musulmans établis dans les territoires palestiniens, ont créé des centres d’endoctrinement et d’aide sociale.

À présent, le Hamas est devenu une organisation terroriste internationale qui continue à tramer de nouveaux complots en vue d’assassiner et de mutiler les Israéliens à partir de ses différentes bases alors qu’il rêve de créer un second régime islamiste et djihadiste en Cisjordanie, comme il l’a fait à Gaza.

Yaakov Lappin est correspondant au Jerusalem Post pour les affaires militaires et de sécurité nationale. Il est l’auteur de The Virtual Caliphate (Potomac Books), un ouvrage qui explique l’établissement d’un État islamiste virtuel par les djihadistes agissant sur internet.

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